2k24
Kreuzlingen/Konstanz (CH/DE) – Mentionné
DONNÉES DE L'ÉQUIPE
Représentant d'équipe : Thibaut Muller (FR) – architecte ; Associés : Anais Godefroy Rieb (FR), Charles Mannenc (FR) – architectes; Hugo Alzingre (FR), Arthur Poiret (FR) – architectes urbanistes
4 impasse Delauney, 75011 Paris – France
+33 6 49 49 76 63 – contact2K24@gmail.com – cargocollective.com/2k24
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A. Godefroy Rieb, C. Mannenc, A. Poiret, H. Alzingre et T. Muller
INTERVIEW
1. Comment s'est constituée votre équipe à l'occasion du concours?
Nous sommes tous les cinq issus de la même promotion de l’école d’architecture de Strasbourg. Connaissant et appréciant le travail de chacun, nous avons naturellement formé cette équipe pour le concours Europan. Aujourd’hui, chacun avance dans un domaine particulier : l’architecture, l’urbanisme, le design et l’organisation de festivals. Nous sommes passionnés par ce que nous faisons, de la plus petite échelle à la plus grande, de l’artisanat de meuble et d’objet à la compréhension d’un territoire ou d’un paysage, etc. Ces visions et ces approches différentes permettent d’avoir une équipe pluridisciplinaire très complémentaire avec toujours une même passion commune : l’architecture.
2. Pouvez-vous définir la problématique principale de votre projet, en insistant sur votre manière de répondre à la question centrale de la session : lʼadaptabilité et les rythmes urbains ?
Les villes, Kreuzlingen (CH) et Konstanz (DE), ont proposé un terrain atypique, avec comme intention principale de reconnecter le site aux deux villes et à leurs habitants et de marquer l’ouverture de la frontière. A la lecture des attentes, nous avons tout de suite orienté le projet autour d’une problématique paysagère comme support des usages. Cette problématique s’attache à reconnecter le site à la fois au grand territoire –par le biais des berges du lac– mais aussi à une échelle plus urbaine en allant chercher des liens avec le tissu existant.
Ainsi, le paysage structure le site et met alors en scène des points d’entrées et des parcours. Il permet d’être flexible aux changements urbains ou événementiels, qu’ils soient pérennes ou éphémères. Notre projet en général et plus particulièrement notre travail paysager tend donc à supporter les variables temporelles et fonctionnelles. Les programmes proposés peuvent évoluer au fil de l'année, le paysage change au fil des saisons et les habitudes varient suivant les différents moments de la journée. C’est par ce biais que nous avons voulu développer notre vision de l’adaptabilité. En définitive, c’est un espace mixte et multiculturel symbolisant la réunion des deux pays. L’identité n’est pas donnée une fois pour toutes, elle se construit et se transforme au fil des années.
3. Comment cette problématique et les questions posées par la mutation du site se sont-elles croisées ?
Afin de répondre à la fois aux problématiques du site et à la question plus globale de l’adaptabilité, nous nous sommes posés la question de « l’identité ». Cette identité s’articule sur plusieurs échelles, elle correspond à la fois au lien physique qu’elle entretient avec le grand territoire, la ville et ses habitants, mais aussi au lien qui existe entre les deux communes, les deux pays. Cette identité, à la fois matérielle et immatérielle, évolue donc au fil du temps, et nous voulions fabriquer un projet qui puisse la représenter, mais aussi s’y adapter.
Ainsi, les rapports à la ville ne sont pas une constante, mais évoluent en fonction de l’heure et des saisons. La nature est le reflet du temps qui passe, toujours changeante, elle intègre les rythmes urbains et s’adapte en fonction de nos projections. Cette nature, nous l’avons placée au centre du projet à travers un système paysager constitué de bandes qui sont le support des différents programmes proposés. Ces bandes offrent une multitude de séquences à travers le site et se confondent avec la bande qui constitue la frontière, notre travail l’intègre, mais ne l’efface pas pour autant. Enfin, le site lui même se positionne comme séquence, à plus grande échelle le long des berges du lac, proposant un parc unique qui symbolise les deux villes.
En effet, c’est à travers ce système tramé que notre projet prend sens. Nous nous sommes ainsi servis de l’ambivalence ou du paradoxe qui existe entre la notion d’adaptabilité et de notre travail pourtant cadré à la manière d’une grille. Cette base, d’apparence rigide, permet d’accueillir des programmes qui viennent coulisser et se transformer à travers le site. Les séquences sont aussi le support de différentes essences d’arbres, de fleurs et de plantes qui changent au fil des saisons. Nous avons imaginé le paysage comme une peinture, un tableau qui n’est pas figé, mais qui évolue au fil de la journée, des saisons et des ans.
Enfin, la Festplatz, élément majeur du programme, se place en position symbolique à la croisée des deux pays et des deux axes majeurs du site, reliant à la fois la promenade des berges, mais aussi la ville et le lac. Nous l’avons pensée comme un lieu à part entière. Il vient rompre le système paysager mis en place et s’articule de façon centrale par rapport au parc. C’est aussi un lieu évolutif que la ville et à ses habitants peuvent s’approprier de nombreuses manières, permettant ainsi de faire vivre le lieu tout au long de l’année, et cela même en dehors des grands événements.
4- Avez-vous déjà traité cette problématique précédemment et pourriez-vous présenter quelques projets références pour le vôtre ?
Le parc comme structure urbaine est un thème courant que l’on peut retrouver dans plusieurs grands projets urbains sur lesquels nous avons travaillés, mais le site de Konztanz/Kreuzlingen possède cette caractéristique particulière d’appartenir à deux pays. Nos références principales furent la proposition de l’OMA pour le concours du Parc de la Villette, mais aussi la réalisation de Bernard Tschumi sur le même site. Ces folies font de ces lieux un endroit unique dans Paris.
5- Aujourd'hui, à l'ère de la crise économique et du développement durable, le projet urbano-architectural doit repenser son mode de fabrication dans le temps ; de quelle manière avez-vous intégré la question du projet processus?
Comme dit plus haut, notre processus de projet joue sur un paradoxe. Il met en scène un paysage figé dans une trame rigide, structurée et très marquée par un système de bandes. Pourtant, ce système se lit et se veut flexible, souple, et les bandes deviennent des supports de programmes et de paysages qui peuvent coulisser, glisser, s'agrandir, se rétrécir... en fonction du temps, des envies, des changements politiques, etc. Enfin, le site de Konstanz-Kreuzlingen offre un grand potentiel de projet, par sa situation dans la ville d'abord, mais aussi par sa taille. Notre volonté au sein de l'équipe était de n'imposer qu'un minimum d'infrastructures lourdes sur ce site et de traiter plutôt un environnement naturel au maximum dans la continuité des berges. Le projet intègre tout de même un programme public complet (espaces culturels et de loisirs, espaces sportifs, mais aussi logements, commerces, activités…) tout en laissant une grande part à la possibilité d’appropriation spontanée des utilisateurs.
Pour résumer, le processus s’articule autour de différentes couches qui se complètent les unes les autres, en suivant ces couches principales :
- Se connecter avec des axes majeurs rapides comme la ligne de frontière, mais aussi inciter à utiliser des sentiers moins fréquentés et moins directs ;
- Une topographie légère qui permet d’accueillir des programmes spécifiques (gradins, skate park, etc.) et qui enrichit le travail paysager ;
- Le système de bandes qui forme des séquences ;
- La disposition des programmes nouveaux et la préservation de certains programmes existants.
6- Est-ce la première fois que vous êtes primé à Europan? De quelle manière cela peut-il vous aider dans votre parcours professionnel ?
Cette récompense pour notre première participation au concours Europan nous motive à faire d’autres concours, urbains et architecturaux et nous pousse également à continuer à travailler ensemble. Pour le moment, nous nous préparons sérieusement et espérons que les deux communes, Konstanz et Kreuzlingen, souhaitent donner suite à leur projet et peut-être envisagent de le concrétiser.