BA 128 Résonnances économes

Metz (FR) – Lauréat

DONNÉES DE L’ÉQUIPE

Représentante d’équipe : Laetitia Lafont (FR) – architecte urbaniste ; Associé : Thomas Verges (FR) – paysagiste
Collaboratrice : Mathilde Catalan (FR) – architecte

Atelier Laetitia Lafont, 42 rue d'Avron, 75020 Paris – France
+33 6 75 81 45 51 – atelierlaetitialafont@gmail.com – www.atelierlaetitialafont.com

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T. Verges & L. Lafont

 

INTERVIEW
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1. Comment s'est constituée votre équipe à l'occasion du concours?

Il s’agit d’abord d’une rencontre au sein d’une agence d’urbanisme et puis d’une vision partagée autour des questions de régénération des territoires et des milieux. Le site de la BA128 de Metz est le parfait laboratoire d’un entrelacement des problématiques paysagères, urbaines et architecturales autour d’enjeux locaux et globaux. Nous travaillons quotidiennement ces questions de fabrication du territoire par nos expériences professionnelles et sur de nombreuses questions du métier d’architecte, d’urbaniste et de paysagiste : de l’échelle territoriale à l’échelle urbaine, architecturale ou du détail, sur des questions de réhabilitation d’un patrimoine classé, vernaculaire ou ordinaire.

2. Quelle est la problématique principale du projet et comment avez-vous répondu à la question centrale de la session : lʼadaptabilité à travers l'Auto-Organisation, le Partage et/ou le Projet (Processus) ?

La Base Aérienne 128 à Metz est une grande pièce urbaine close et désaffectée. Incapable d’entretenir et de transformer ces sites militaires, l’état se défait de certains d’entres eux. Il s’agit donc d’anticiper la mutation et d’envisager l’ouverture du site à son territoire, à la ville de Metz, et ainsi d’affirmer les vocations économiques, sociales et environnementales de ce fragment de territoire pour penser son futur développement. Le projet propose une ouverture progressive et raisonnée de la base aérienne autour d’un phasage réglé par l’arrivée successive de programmes pionniers (la recyclerie, la piste comme espace public), puis de programmes d’expansion (pôle écologique, agrobiopole, logements, tertiaire) et enfin, de programmes de renforcement (centre sportif, lieux de loisir, espaces d’activité). Le territoire du plateau de Frescaty propose un large éventail de ressources constructives et paysagères, de savoir-faire locaux, à même de participer à l’ancrage du projet. Ce projet-processus nécessite de trouver des résonnances et des solidarités à l’échelle locale (agglomération messine), mais également à l’échelle globale (européenne) afin de poursuivre et accroître les interfaces ; notamment avec le pôle écologique et l’agrobiopole, programmes pilotes.

 

3. Comment la problématique et les questions posées par la mutation du site se sont-elles croisées ?

Le projet compose avec son héritage, tisse avec les paysages, les infrastructures, les activités et les bâtiments existants. L’identité du territoire, son dynamisme actuel qualifie le site et inversement. La mutation de cette “pièce“ a comme point de départ les qualités intrinsèques des lieux, ce qui est déjà là, comme préambule à la mutation, au récit d’une histoire commune. Au delà des usages qui font vivre un territoire et du sol qui garantit sa pérennité, le projet urbain ne peut avoir d’horizon figé. Le projet envisage donc le cadre collectif d’une interprétation qui sera par la suite plus individuelle, c’est-à-dire un maillage d’espaces publics pérennes, des trames (paysagères, bâti, viaires…) parfaitement adaptables au gré des appropriations foncières et des investissements publics et privés. La modularité du découpage, des programmes, du processus permet de faire évoluer le projet, de qualifier les lieux en créant une identité remarquable tout en instaurant une souplesse d’aménagement.
L’espace change et fluctue à l’intérieur d’une trame paysagère forte qui met en exergue la géographie tout en qualifiant les franges pour retrouver une continuité territoriale entre la Seille et la Moselle. Le caractère flexible du projet s’appuie sur des dynamiques cycliques de gestion des milieux et d’aménagement (mobilier démontable, programmes évènementiels, architecture et rénovations d’espaces flexibles, mutables…).

 

4. Avez-vous déjà traité cette problématique précédemment ? Quels ont été les projets références pour le vôtre ?

Le projet à Savenay (suite du concours Europan 11, lauréat) sur lequel nous travaillons à l’élaboration de la stratégie d’aménagement et du plan guide en vue de la création d’un nouveau quartier au Sud du Pôle d’échange multimodal traite également cette problématique de requalification d’un territoire déconsidéré et enclavé. Situé à équidistance de Nantes et Saint-Nazaire, Savenay est une commune où le développement démographique est le plus important à l’échelle de l’estuaire. Ainsi, afin de répondre aux enjeux et ambitions du territoire, et donc des orientations du Pôle Métropolitain, il s’agit ici d’inventer la nouvelle figure du péri-urbain à l’échelle de l’estuaire ligérien.
À l’échelle de la commune, le quartier gare pose des questions concrètes : que faire de cette zone d’activité, en contrebas du bourg, de l’autre côté des voies ferrés ?
Le projet propose alors une série de “Mesures Ligériennes“, boîte à outils opérante qui permet d’orchestrer un développement progressif et mixte. Nous travaillons une forme urbaine associant îles habitées (logements, commerce, tertiaire) et îles actives (activité et tertiaire) au sein d’un milieu végétal bocager existant, mais renforcé. L’infrastructure hydraulique et bocagère devient le négatif préalable au projet urbain. Le paysage de la plaine est prolongé au cœur du quartier et dessine un nouveau pour trouver de nouvelles alliances et cohabitations entre milieux naturels, habitat et activité.

 

5. Aujourd'hui, à l'ère de la crise économique et du développement durable, le projet urbanoarchitectural doit repenser son mode de fabrication dans le temps ; de quelle manière avez-vous intégré la question du projet processus ?

La dynamique transfrontalière de l’agglomération messine et la grande dimension du site nous amènent à questionner les processus de fabrication, de pilotage et de gouvernance d’un projet urbain de cette ampleur. C’est pourquoi, afin de répondre aux enjeux locaux et territoriaux, le projet associe impulsions publiques et initiatives citoyennes. A travers les différents programmes et usages, le projet questionne le mode de fabrication traditionnel. L’implication citoyenne en amont est primordiale pour développer et affirmer une identité partagée du lieu.

- La recyclerie est le programme pionnier du projet. Présent en amont, c’est l’outil qui va orchestrer le ballet les démolitions, dépollutions dans un temps 1 ; des tris et recyclages, dans le temps 2 ; pour enfin proposer une transformation et réutilisation des matériaux dans le projet tout au long de sa transformation (espace public, énergie, construction…) ;
- La piste, tracé hérité de l’histoire du lieu, devient l’espace public central. Articulé autour de cette grande respiration qu’est la piste d’atterrissage, le parc révèle la mémoire du site en ré-enchantant ce patrimoine militaire et en lui offrant un nouvel usage, ouvert aux habitants ;
- L’agrobiopole est l’épicentre de l’excellence. C’est un complexe associant enseignement agricole, laboratoires en salles et parcelles d’expérimentation. Il fonctionne en étroite collaboration avec le pôle écologique le tout tourné vers l’innovation et la recherche à l’échelle locale et européenne ;
- Le pôle écologique est en résonance avec les ambitions métropolitaines et le rayonnement européen de Metz. Le site est amené à devenir un atelier actif, participatif, expérimental et pédagogique en lien avec les différentes typologies paysagères (bois, haie, noue, bassin d’infiltration, prairie, friche…) Il met en scène la faune et la flore du quotidien, le cycle de l’eau et les énergies alternatives ;
- Le pôle d’excellence sportive, préexistant sur le site, est renforcé. Les terrains et bâtiments actuels sont conservés et rénovés. D’autres, neufs, viennent prendre place dans le parc, complétant l’offre ;
- Les zones d’activité sont circonscrites, mais renforcées. Nous réinterrogeons les enjeux de qualité de ces zones d’activité, notamment en travaillant les bords, les marges, les porosités, les interfaces avec les programmes limitrophes.

6. Est-ce la première fois que vous êtes primé à Europan? De quelle manière cela peut-il vous aider dans votre parcours professionnel ?

Nous avons déjà participé au concours Europan. L’Atelier Laetitia Lafont, associé à l’Atelier Georges, développe actuellement une mission de Maîtrise d’œuvre urbaine sur le site de la Gare Loire et Sillon à Savenay, issu d’Europan 11, gagné en 2012.
De sessions en sessions, le concours Europan propose une variété de sites et de contextes opérationnels et remarquables tout en mobilisant des élus et acteurs du territoire. C’est ce qui nous a permis dans l’exemple de Savenay d’être titulaire (à la suite d’une remise en concurrence) d’un accord cadre d’une durée de 6 ans. C’est donc un formidable moyen d’accéder à la commande pour de jeunes agences.