Permaculture
Saint-Herblain (FR) – Mentionné
DONNÉES DE L'ÉQUIPE
Représentant d'équipe : Anne-Lise Gruet (FR) – architecte; Associés: Amélie Allioux (FR), François Hamon (FR) – architectes; Maud Nÿs (FR) – architecte, ingénieure génie civil; Anne Petit (FR) – plasticienne
Collectif Fil, 30 Boulevard Gustave Roch, 44200 Nantes – France
+33 6 88 55 98 31 – contact.collectif.fil@gmail.com – www.collectif-fil.com
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A. Allioux, A.-L. Gruet, A. Petit, M. Nÿs et F. Hamon
INTERVIEW
1. Comment s'est constituée votre équipe à l'occasion du concours?
Quatre architectes membres du Collectif Fil, association de recherche action en architecture et urbanisme créée en janvier 2013, se sont associés à un autre architecte devenu depuis membre du Collectif. Le concours Europan représentait pour notre équipe l'opportunité de confronter nos expériences et réflexions locales au débat plus large, porté par le concours sur la manière de faire la ville.
2. Pouvez-vous définir la problématique principale de votre projet, en insistant sur votre manière de répondre à la question centrale de la session : lʼadaptabilité et les rythmes urbains ?
Face aux enjeux du site et du thème, notre positionnement a été de proposer une méthodologie dynamique qui part des problématiques locales et se base sur un processus itératif, pour un projet défini, mais non figé. Nous proposons l’auto-reconstruction du quartier de Preux, à partir d’éléments déclencheurs de plusieurs dynamiques urbaines, dans une logique de renouvellement permanent.
La force de ces dynamiques, de ces processus, réside dans le fait qu’ils ne soient ni dépendants les uns des autres, ni dépendants d’un phasage d’aménagement d’ensemble, mais qu’ils se nourrissent entre eux et se recoupent de manière complémentaire. Autour de quatre processus, nous proposons des réponses pour le quartier, mais elles ne sont pas exhaustives. Ces premiers processus ne demandent qu’à être enrichis par d’autres initiatives.
Les processus s’initient et se constituent autour du temps court de l'évènement et du quotidien face au processus lent de l'échelle macro, de l'imbrication des dynamiques du territoire avec les particularités du quartier, et d'une mise en confrontation des intérêts privés et collectifs. Illuminer des polarités pour inclure le quartier dans un tissu urbain global, tout en refusant le présupposer le devenir local des polarités identifiées.
Reconsidérer qu’une ville n’est jamais finie, en chantier continu, donne sa chance à la négociation, et à la possibilité d’altération des projets urbains grande échelle par l’échelle vécue, vers une cohérence du vivre ensemble.
3. Comment cette problématique et les questions posées par la mutation du site se sont-elles croisées ?
Le site de Preux souffre d'un manque d'adaptabilité dans le temps des idéaux et dispositifs qui l'ont créé. C'est un quartier qui aurait a priori tout pour fonctionner, mais il a vieilli et de nombreux liens sont à renouer. C'est un quartier de grande qualité, propice à l’épanouissement des relations de voisinage, qui s'est retrouve entouré peu à peu par des projets de très grande ampleur, qui le dépassent.
La méthodologie de Permaculture est ainsi partie du lieu pour rendre la mutation évidente. Chaque processus proposé s'appuie sur un enjeu du quartier et dialogue avec les leviers identifiés du territoire. L'enjeu n'est pas que Preux s'adapte aux changements qui l'entourent, mais que les projets aux alentours nourrissent Preux en permanence, comme Preux devrait davantage les nourrir.
4. Avez-vous déjà traité cette problématique précédemment et pourriez-vous présenter quelques projets références pour le vôtre ?
Cette problématique est au cœur de la réflexion de l'urbanisme contemporain. Le Collectif Fil, association de recherche action, traite de nouvelles manières de faire la ville, à plusieurs niveaux, urbain, architectural, design, en établissant une méthodologie toujours remise en question par confrontation au contexte.
Le projet de La Nizanerie, à l'origine de la naissance du collectif, a beaucoup influencé notre réflexion sur ce thème. C'est un projet de construction participative de l'espace public sur l'ile de Nantes, qui emmène le Collectif Fil sur le terrain et dans une prise de recul constante sur la fabrication de la ville.
C'est un projet et un lieu qui se renouvelle constamment, transformé par ses participants, par les initiatives de chacun et les évènements rencontrés. Il agit sur les intentions politiques -décisions urbaines- de ce quartier de l'Île de Nantes par les dynamiques urbaines qu'il entraîne. Cette mise en action concrète de l'échelle micro et de la participation nous a permis d'inventer une méthode à plus large échelle.
Par ailleurs, la recherche prend une place majeure au sein des activités du Collectif Fil, et ce sont de nombreuses lectures qui alimentent notre réflexion, des situationnistes à Rifkin, et de L'enseignement de Soweto (Christophe Hutin) à la métaphysique de Heidegger. La mise en débat de l'action et de la recherche théorique entre membres, habitants et experts est une source constante de projets. La pluridisciplinarité et l'échange donnent corps aux propositions.
5. Aujourd'hui, à l'ère de la crise économique et du développement durable, le projet urbano-architectural doit repenser son mode de fabrication dans le temps ; de quelle manière avez-vous intégré la question du projet processus?
C’est au cœur de notre réflexion et pour cela que nous nous sommes constitué en collectif.
Nous intégrons cette problématique en incorporant la notion de temps court dans le temps habituellement long du projet urbain. Des évènements rapides à une échelle micro altèrent et complètent le projet global à une échelle macro. Cela permet d’établir des processus de transformation de la ville à la fois moins traumatisants et moins chers, donc de ménager une possibilité de remise en question des interventions au cours de leur développement. De cette manière, il est plus acceptable d’innover, car en cas d’échec, la prise de risque financier est réduite.
L’urbanisme des grands projets qui s’appuie sur des investissements importants demande à être complété et influé par un urbanisme de la frugalité, qui prônerait une multitude d’interventions plus courtes et permettrait de réajuster le projet et de l’adapter dans le temps.
Le projet durable est avant tout celui qui s’adapte aux changements rapide de notre société.
6. Est-ce la première fois que vous êtes primé à Europan? De quelle manière cela peut-il vous aider dans votre parcours professionnel ?
Oui, et c’est notre première participation. Aujourd’hui, cela appuie le développement du Collectif Fil vers une encore plus grande professionnalisation, et nous conduit vers la création d’une structure professionnelle de maîtrise d’œuvre, tout en protégeant activement la part de recherche indispensable à la pratique de l’architecte et de l’urbanisme mise à mal par la nécessité économique du métier.