Kintsugi, ou la stratégie des petits moulins
Pantin (FR) - Lauréat
DONNÉES DE L’ÉQUIPE
Représentant d’équipe : Daniel Garcia Lopez (ES) – architecte
Associés: Paul Jacquet (FR), Jean Remy Dostes (FR) – architectes et urbanistes; Louis Lazaro (FR), Eugénie Denarnaud (FR) – paysagistes; Alegria Giovannini (CL), Dimitri Pagnier (FR), Nicolas Bayret (FR) – architectes
Collaborateur: Simon Cristiano (FR) – étudiant en architecture
Atelier FUSO, HAME, 6 rue Philippe de Girard, 75010 Paris (FR)
01 85 08 35 30 – contact@atelierfuso.com – atelierfuso.com
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D. Garcia Lopez, A. Giovannini, D. Pagnier, S. Cristiano, N. Beyret, J.R. Dostes, P. Jaquet et L. Lazaro
INTERVIEW
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1. Comment s'est constituée votre équipe à l'occasion du concours ?
L’équipe volontairement pluridisciplinaire (architectes, urbanistes, paysagistes) s’est constituée fin 2016 lors de notre participation au concours Bas Carbone pour lequel nous avons été lauréat en 2017. Ce concours de recherches prospectives organisé par EDF nous a permis de développer des réflexions et une dynamique de travail commune que nous avons souhaité prolonger.
2. Quelle est la problématique principale du projet et comment avez-vous répondu à la question centrale de la session : la place des activités productives au sein de la ville ?
Notre projet est, en quelque sorte, une synthèse de nos questionnements autour de deux grandes problématiques :
- Comment accompagner la transformation du cœur de ville dans son ensemble au travers d’une réflexion sur l’avenir du travail et de l’activité économique?
- Comment faire muter certains îlots privés en activités pour les ouvrir sur l’espace public tout en utilisant les ressources existantes (technologiques, énergétiques, logistiques, organiques…)?
Nous faisons l’hypothèse que la ville productive de demain sera multiple et dépassera largement les catégories traditionnelles: industrie, tertiaire, artisanat… Dans la lignée des recherches menées par le philosophe Bernard Stiegler, nous intégrons l’urgence de différencier l’emploi qui s’automatise (47% des métiers risquent de disparaitre dans les deux prochaines décennies), basé sur des objectifs de consommation et le travail qui est au contraire « désautomatisé », créateur de sens, d’imprévus, et de « capabilités ». Cette nouvelle ville productive bouscule donc les façons de faire : apparition de nouveaux lieux et programmes, élargissement des lieux d’apprentissage, renforcement des liens entre lieux de travail et espaces publics…
3. Comment la problématique et les questions posées par la mutation du site se sont-elles croisées ?
Le site pose la question du devenir de la « vie urbaine et productive » nécessairement liée aux forces urbaines existantes : activités, équipements, filières économiques, espaces publics et infrastructures structurantes, etc. La stratégie « Petits Moulins » s’appuie sur les pépites existantes (Hermès, Grands moulins, galerie Thaddaeus Ropac, cité de l’environnement, écoles..) et propose une adaptation en douceur du tissu économique actuel dans le but d’y intégrer les lieux et les conditions de la nouvelle économie bas carbone et contributive tout en renforçant les économies et vocations existantes : luxe, métiers d’art, culture et sport, etc. L’ensemble des ressources (matières premières, outils, lieux…) sont intégrées à la réflexion afin de créer un véritable écosystème écologique et apprenant. La stratégie tire parti des typologies et potentialités offertes par le foncier et les typologies architecturales industrielles existantes : adaptabilité dans le temps, générosités des espaces… Le quartier de la gare de Pantin peut ainsi devenir un véritable laboratoire urbain de la nouvelle économie en profitant des dynamiques existantes : Est-ensemble, pole Pleyel et Paris Nord-Est… Notre proposition fait le pari d’un urbanisme négocié et évolutif, dans lequel les différents acteurs et programmes sont au service des usagers de la nouvelle ville productive : circularité, apprentissage, écologie, recyclage, technologies bas carbone, mutualisations intelligentes…
4. Avez-vous déjà traité cette problématique précédemment ? Quels ont été les projets références pour le vôtre ?
Pas directement, mais nous avons eu l’opportunité de travailler dans le cadre du Concours EDF Bas Carbone pour la construction d’un quartier neutre en carbone à l’horizon 2050. Lors de cette étude nous avons approfondi des questions contingentes à celles que suggère la ville productive: les indices de circularité (matière organique, matière technologiques, énergie, et eau) , les processus de production , transformation et recyclage de la matière dans la ville, les nouvelles façons d’aborder la logistique, le loisir, le paysage…. De la même façon, les deux sites, par leurs positionnements posent la question de l’avenir des ilots monofonctionnels devenus obsolètes mais aussi des formes urbaines adaptées aux centralités de demain.
5. Les projets urbano-architecturaux de type Europan ne peuvent se réaliser que dans une relation aux acteurs à travers un processus négocié et dans le temps. De quelle manière avez-vous intégré cette question dans votre projet ?
Le projet Kintsugi propose une stratégie et une intervention globale. Elle permet de définir une « attitude » et une série d’invariants. Cette façon de faire permet de laisser une grande place à la négociation dans le temps et à l’évolution d’un tissu par nature complexe. Loin d’être un ensemble de solutions fermées, le projet Kintsugi agit en parallèle sur la constitution d’un réseau d’espaces publics, la mise en place de logiques d’agrégation et d’échanges entre les programmes ou encore l’ouverture de certains sites à la société civile. A l’opposé d’une posture fonctionnalistes, le projet Kintsugi propose de rapprocher certaines fonctions clefs : distribution, formation, stockage, logistique, transformation… dans une logique vertueuse : diminution des émissions carbone, augmentation de la circularité des ressources, mutualisation des besoins, interactions sociales… Ces objectifs nécessitent un engagement de chaque acteur afin de reconnaitre la valeur des savoirs-faire actuels mais aussi les possibilités permises par les nouvelles filières écologiques, numériques…, leurs potentiels d’innovation et de créativité. L’ensemble des acteurs existants : Renault, Peugeot mais aussi la Ville ou la SNCF sont associés à ce dispositif.
6. Est-ce la première fois que vous êtes primé(s) à Europan? De quelle manière cela peut-il vous aider dans votre parcours professionnel ?
Parmi les membres de l’équipe, Hame a été lauréat de 2 autres Europan : à Saint-Herblain pour l’édition 12 (avec l’atelier Chuck) et à Bordeaux pour l’édition 13. Le projet à Saint-Herblain autour des quartiers Preux-Cremetterie a débouché sur une étude de programmation urbaine sur une durée de 4 ans. Elle a clairement permis à l’agence Hame de se constituer mais aussi d’enrichir ses réflexions urbaines : inscription métropolitaine, métamorphose d’une cité jardin, reconquête des espaces publics, etc.