Métropole Rouen Normandie (FR)

Les défis du milieu habité

La métropole de Rouen s’est lancée depuis 25 ans dans une démarche de reconfiguration de la relation de la ville à la Seine à travers de nombreux projets d’aménagement.A l’image de nombreuses métropoles françaises et euro- péennes, cette reconnexion avec le fleuve s’est principalement concrétisée par la reconversion des anciennes res- sources foncières industrielles,la requalification des infrastructures routières, la création de nouveaux quartiers et de grands d’équipements métropolitains. Dans ce contexte, le secteur Seine-Amont est jusqu’à aujourd’hui resté à l’écart de ce processus et n’a fait l’objet que d’une étude urbaine en 2015 sans aboutissement opérationnel. En 2020, le nouveau PLUI à l’échelle métropolitaine met le secteur Seine Amont dans ses priorités territoriales en faisant l’objet d’une «OAP Grands Projets».
Il est ainsi un des derniers sites de la Métropole Rouen Normandie pour expérimenter de nouvelles façons de penser la relation ville-fleuve, dépassant les schémas classiques de reconversion de secteurs industriels et de requalification de rives de fleuves. Lieu de vie, lieu productif et lieu de passage contraint entre la Seine et les coteaux, le secteur est aujourd’hui l’illustration d’une cohabitation complexe entre les résidents, les usagers économiques, les passants routiers et le vivant. Emprises économiques et productives, faubourgs résiden- tiels, terrains de sports et espaces naturels se juxtaposent de part et d’autres des infrastructures traversant le site. Cette réalité fragmentée s’est accentuée jusqu’à récemment par une évolution du site au coup par coup, dans une logique d’opportunité sans amélioration du cadre de vie pour ses résidents humains et non-humains. Si une vision d’ensemble s’esquisse aujourd’hui à travers les outils réglementaires et une OAP sur le secteur, cela n’a pas encore permis de remise en question plus profonde des logiques d’habitat, d’usage, d’aménagement et de gestion du site.
Le concours Europan est donc l’opportunité de dépasser les idées pré-établies, de remettre en cause les blocages actuels,dechangercertains modesdeconceptionetdegestiondusite. Ils’agit de«ré-ouvrirlejeu»et d’expérimenter, d’imaginer d’autres perspectives de mixité fonctionnelles, de cohabitation d’usages et du vivant, d’usages des infrastructures, et d’alliances nouvelles entre usagers et gestionnaires dans le paysage et la biodiversité du secteur.

Questions aux concurrents

Plusieurs évènements et reconfigurations récentes sur le territoire amènent à porter un regard neuf sur le site. Premièrement, l’incendie industriel survenu à Rouen le 26 septembre 2019 sur les sites des entreprises Lubrizol et NL Logistique à mis à l’agenda la question de la place de l’industrie dans la métropole et de l’exposition des populations et des milieux naturels aux risques industriels. Si l’accident a mis la métropole face à l’héritage industriel de ses rives de Seine et à ses risques, ce fut aussi l’occasion de percevoir le chemin parcouru depuis les années 60 dans les efforts de dépollution et de protection du milieu naturel séquanien. L’évo- lution du secteur, marqué par l’activité économique et la présence de sites à risques, est ainsi l’occasion d’expérimenter ces relations entre les activités productives et le vivant. De plus, les questions actuelles de sobriété foncière et la mise en place de la trajectoire Zéro Artificialisation Nette viennent renforcer les enjeux de revalorisation des anciennes unités industrielles.
Deuxièmement, les reconfigurations institutionnelles récentes, et notamment l’initiative Axe Seine et le regroupement récent des trois ports du Havre, de Rouen et de Paris, amènent à regarder l’activité du site Seine-Amont et son évolution à une échelle élargie. Il s’agit de repenser le secteur dans le rôle qu’il peut jouer dans le territoire de la vallée de la Seine et dans une économie mettant en compétition les grands ports européens.
Troisièmement, la perspective du contournement Est permettant un report du trafic routier, ainsi que l’évolution globale vers des logiques de mobilités plus sobres pour les activités logistiques, peuvent changer la donne concernant le transit traversant le secteur. Il devient possible d’imaginer un bouleversement de l’état actuel du site où des frontières sont créées par des infrastructures pensées et dimensionnées aujourd’hui pour les déplacements à grande échelle et pour les manœuvres logis- tiques. Resté jusqu’alors relativement en dehors des radars de l’aménagement et des grands investisseurs pri- vés, le secteur Seine-Amont cristallise ainsi de nombreuses préoccupations actuelles dans ce moment crucial où les questions environnementales nécessitent de changer les modes d’action et les récits pré-établis.